Digne et debout !
Nous nous levons pour changer de position, de situation, et parfois symboliquement, pour sortir d’une situation déplaisante ou difficile. Debout pousse au mouvement, à la mise en route, à l’action.
Les proverbes sont souvent assez parlants...
- “Tout paysan debout domine noble à genoux.”
- “Sept fois à terre, huit fois debout.”
- “Il est impossible de se tenir debout en ce monde sans jamais se courber.”
- “L’amour, c’est la plus belle invention pour tenir les gens debout.”
La dignité a plusieurs acceptations possibles.
Nous pouvons d’abord y voir un parallèle avec l’honneur d’une personne, d’une fonction, avec : « Une valeur éminente qui s’attache à toute institution... ou toute personne ». (G. Cornu, Vocabulaire juridique, PUF, 2013)
Plus encore, la dignité peut se rattacher à : « Une qualité rattachée à la personne humaine » (C.Girard et S. Hennette-Vauchez S., La dignité de la personne humaine, recherche sur un processus de juridicisation, PUF, 2005) recouvrant dès lors : « Le respect dû par les tiers à toute personne », à l’origine des droits de l’homme, des législations sociales, se traduisant par exemple par l’interdiction pour le bailleur d’expulser les locataires, pendant la période hivernale
De même, les conditions de logement peuvent être constitutives de : « Un traitement dégradant », par référence à l’article 3 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales selon lequel : « Nul ne peut être soumis... à des peines ou traitements inhumains ou dégradants » (CAA Nantes, 5 juillet 2012, Garde des Sceaux, n°11NT00495).
Mais une nuance est à faire entre, d’une part, ce qui relève d’une situation : « De déchéance extrême » où les conditions de survie sont en jeu, et, d’autre part les droits sociaux.
Ces derniers ont pour vocation : « D’exiger de la société non seulement des abstentions mais aussi des prestations matériellement indispensables à la dignité de la condition humaine ».
En 1930, P. Roubier soutenait que la propriété privée incarnait la dignité humaine, l’objectif devant être de «faciliter l’accession à la propriété» aux «moins fortunés... pour les relever de leurs propres yeux» (P. Roubier, Théorie générale du droit histoire des doctrines juridiques et philosophie des valeurs sociales, Dalloz, p. 279).
Il est rejoint par F. Zenati-Castaing, laquelle rapproche la dignité de la notion de propriété : « Pouvoir unique qu'a l'espèce humaine d'être le législateur de sa vie, ce qui est une autre manière d'exprimer le pouvoir juridique que l'on a sur soi... ce qui est consubstantiel à sa nature » (F. Zenati-Castaing, La propriété, mécanisme fondamental du droit, RTD Civ. 2006, p. 445).
Entendue comme une qualité de la personne humaine qu’aucun tiers ne peut toucher, elle se rapporte à : « Une qualité opposable à l’homme par des tiers », dont l’illustration la plus claire porte sur les décisions du Conseil d’Etat du 27 octobre 1995.
Dans deux communes, les maires avaient interdit le spectacle de : « Lancer de nains » lors de manifestations foraines. Relevant : « L’exhibition contre rémunération », le Conseil d’État constatait l’atteinte : « Générale et absolue » à la dignité humaine dépassant la motivation d’une mesure de police liée aux circonstances locales et écartant le moyen selon lequel ce spectacle était une garantie de ressources et d’insertion sociale de la personne atteinte de nanisme.
13 ans après les décisions du Conseil d’Etat du 27 octobre 1995 précitées, M. Canedo dressait le bilan de cette jurisprudence : « En somme, le juge administratif a imposé une conception subjective mais aussi, en quelque sorte, absolue, de la dignité humaine ». Il est compréhensible que soit soutenu un droit à la dignité au service de l’homme dont la norme est supérieure, «condition de validité dans l’association humaine durable». En ce sens, la dignité est : « Epression de l’humanité en l’homme ». (F.Tourette, Extrême pauvreté et droits de l’homme, Fondation Varenne, thèse, LGDJ, 2001 p.51)
S’il y a bien quelque chose qui nous dépasse, si la dignité relève d’une valeur supérieure, alors nous pouvons peut-être reconnaître Dieu qui, dans sa bonté, nous relève de nos défaillances ou nos péchés. Ainsi se tenir debout se fait par l’aide de Jésus.
Témoignage de Josiane, bénévole à l'équipe d'accueil de Mende
Que fais-tu au Secours Catholique ?
Je suis notamment à l’accueil une fois par semaine.
Qu’est-ce qui te pousse à cette action ?
J’aime bien les gens, le contact avec les gens. Pour les gens en précarité peut-être que je me sens davantage utile. Pour moi, c’est assez naturel que je me mette à leur place, je peux leur apporter quelque chose et je les écoute. Je pense qu’il faut aimer les gens, les considérer comme
nous, comme s’ils étaient nos enfants.
Comment définirais-tu la dignité ?
La dignité, c’est le respect de la personne. Ne pas lui faire remarquer qu’il est dans le besoin car il est en train de vivre quelque chose de normal, une mauvaise passe. J’espère toujours que les choses vont s’arranger pour lui. De toute façon, tout le monde peut être concerné par cette situation. Mon âge, mon expérience dans la vie facilite aussi cette transmission de pensée positive.
«Debout et digne», que cela t’inspire t’il ?
Il ne faut jamais renoncer à s’intégrer dans la société, toujours aller de l’avant. Parfois il faut savoir demander de l’aide plutôt que de tomber. Et toujours relever ce qu’il y a de positif chez l’autre.
Pascale Capot